Les derniers tests avaient révélé que le plateau de mon Baobab était trop grand pour envisager une édition : il me fallait donc le réduire.
De manière drastique, après avoir imaginé retirer une ligne et une colonne, j’opte pour un plateau de 4 zones par 4 zones, soit un total de 16 en lieu et places des 64 initiales !!!
Certes, on allait ainsi réduire le matériel requis et la durée de la partie, mais n’allait-on pas aussi réduire ses possibilités stratégiques ? Il me fallait essayer et, hop, c’était reparti pour de savoureuses phases de tests…

Très rapidement, je m’aperçus qu’il fallait adapter la règle : placer jusqu’à trois pions sur un plateau aussi petit déséquilibrait le jeu, sans parler de l’avantage d’être premier joueur. Du coup, on en placerait que un ou deux, toujours avec la même contrainte de pose. Et puis, pour niveler l’avantage de démarrer, le premier joueur n’aurait le droit de ne placer qu’un seul pions.
Et là, ce fut la révélation : le jeu tournait aussi bien que précédemment, il en avait tous les avantages mais plus aucun inconvénient ! Il semblait devenir encore plus dynamique et son évidente perte de possibilités stratégiques n’était par si marquée que cela. Tenais-je le bon filon ? Pour le savoir rien de tel que d’approcher à nouveau des éditeurs…
Le premier éditeur à qui j’ai présenté le jeu, à Essen en 2009, l’a tout bonnement adoré. Paraît-il qu’ils y ont joué tout au long du trajet retour dans l’avion, sur la petite table devant eux ! Rapidement après le salon, ils m’ont dit vouloir le faire. Il leur restait à trouver le moyen de le faire fabriquer à moindre coût, sachant que :
– Ils voulaient une édition assez luxueuse au niveau du matériel,
– Ils avaient besoin que je leur dise exactement le nombre de pièces de jeu,
– Fabriquer les plaques en forme de C ne paraissait pas si facile…

Les échanges par mail furent nombreux et constructifs : on avançait ensemble pour obtenir un jeu magnifique. Mais le temps passa… 2009, 2010, 2011… Trois ans et demi, oui trois ans et demi pour au final qu’ils m’avouent être dans l’incapacité de le faire !!! Ils adoraient toujours autant le jeu, mais n’auraient pas pu le sortir à un tarif correct. Du coup, ils préféraient passer la main et m’assuraient qu’ils seraient mes premiers clients si je trouvais un éditeur capable de le faire… Déçu, j’étais, un truc de fou… Mais au moins, j’ai rencontré des gens passionnants et passionnés, lesquels m’avaient aidé à faire progresser encore ma règle : on aurait au maximum 8 plaques et 12 pions par joueur, et si on ne peut pas jouer on a perdu. Limpide et encore source de tension dans la partie, forçant parfois à prendre une zone…
Ensuite, vint un autre éditeur, convaincu lui aussi que le jeu avait sa place dans sa gamme. Après quelques mois de tests, toujours aussi concluants à deux joueurs, ils me demandèrent une possibilité d’y jouer à 3 ou 4 joueurs. Et hop, je retourne en phase de conception… Peu de temps après, je leur envoie une règle qui tournait, particulièrement à 3 joueurs, même s’il y avait un côté un peu artificiel à l’époque.
Quelques semaines plus tard, le verdict tombait : ils ne le feraient pas ! La raison ? Je ne la maîtrise encore pas bien aujourd’hui…
Parallèlement à ces questionnements éditoriaux, je poursuivais ma réflexion pour aller, peut-être, jusqu’à l’éditer moi-même ! Mais ce n’était pas facile, d’abord parce qu’on ne se lance pas à la légère dans l’édition de jeux. Ensuite, parce que le temps me manquait en parallèle de mon métier de professeur des écoles. Du coup, je me suis dit que pour lui offrir un meilleur éclairage, j’allais le thématiser et envoyer une candidature à un concours de créateurs.

Le thème, avec un jeu de mots un tantinet stupide : Bora Bora (oui, relier bord à bord…), est celui d’une île paradisiaque sur laquelle on va tenter de relier les deux berges opposées. Je conçois un proto avec des pions en bois, pas très bien assemblés (n’est-ce pas Oriol ?), et j’envoie le tout au concours de Granollers en Espagne en 2010. Le jeu s’en sort super bien puisqu’il intègre le groupe des finalistes et qu’il est donc testé par tous les visiteurs de la convention espagnole pendant tout un week-end ! Pas de prix finalement, mais une certaine satisfaction et une certitude à présent que le jeu DOIT sortir chez un éditeur…

Bon an mal an, toujours dans l’attente de la réponse de l’éditeur sus-cité, je temporise finalement jusqu’à 2013, et le Spiel à Essen, afin de le représenter à quelques compagnies. Je reprends mon bâton de pèlerin, avec la version non-thématisée, ayant abandonné le nom Bora Bora, Stefan Feld m’ayant piqué le nom, dites donc ! 😉
Je me rends sur le stand de Clemens Gehrards, l’éditeur qui deviendra à jamais celui qui aura réussi à le faire !!! La famille Wiedenmann, quasiment au complet sur le stand, et qui gère le développement des jeux des jeux de cet éditeur, se prend d’intérêt pour celui-ci. Ils me demandent un prototype. Cocorico ! Et ça motive…

Au printemps 2014, lors du festival des jeux de Cannes de février, je ne m’y déplace pas les mains vides : grâce à Olivier Chabert, gérant de L’Atelier du Merle dans mon village, je dispose de quatre prototypes aimantés en bois, ainsi que d’une version surdimensionnée hyper tactile. Je le sors, en compagnie surtout de mon fils Tristan qui a bien grandi à présent, à toutes les soirées Off. Et ça se passe plutôt bien… Les joueurs et les auteurs de jeu s’y essaient, avec plutôt pas mal de plaisir. Ca promet…








Lorsque arrive Essen 2014, je relance Clemens Gehrards pour savoir où ils en sont de leur réflexion. Un rendez-vous est pris sur leur stand le jeudi de l’ouverture du salon. Je ne le sais pas encore, mais ce sera le début d’une belle aventure…
La suite au prochain épisode, lors duquel vous découvrirez les toutes premières images du matériel définitif ainsi que celles de la sortie officielle du jeu…
Éh bien, je comprends le plaisir/soulagement que ça sorte. Tu vas pouvoir réfléchir à un autre jeu maintenant 🙂
« Des » oui « des »……………..
et les protos sont en cours de production à la main… 😉